Alors que les discours politico-médiatiques se focalisent sur la « crise migratoire », les politiques qui y sont liées ou encore les faits divers impliquant des « immigrés », la seconde partie du docu-film Crossing the Color Line – Healing from the Past donne la parole, en première personne, aux Afro-descendants italiens sur ces questions devenues (et rendues) controversées.

Porteurs d’un parcours migratoire — et donc d’une double héritage — mais aussi du stigmate associé à l’immigré en raison de leur apparence phénotypique, dans un pays où l’identité nationale et la « blancheur » demeurent étroitement liées dans l’imaginaire collectif, les « Afro-Italiens » — dont la présence n’est pas encore normalisée — sont souvent perçus comme des perturbateurs de l’équilibre ethno-culturel du pays. Leur italianité est mise en doute, et ils sont considérés comme une présence exogène qui devrait « s’intégrer » plutôt que « se communautariser », voire « retourner dans son pays ».

Au-delà des catégories et des théories, ce documentaire souhaite offrir un accès direct aux récits, préoccupations et besoins d’une minorité dont l’expérience permet de comprendre l’ancrage national de mouvements sociaux globaux tels que l’afro-féminisme ou l’antiracisme, tout en éclairant les spécificités du contexte italien.

Le passé et le présent s’entrecroisent à travers les témoignages des personnes rencontrées et l’excursus historique sur la période coloniale italienne et européenne, permettant de comprendre non seulement comment l’Autre — l’Africain racialisé — a été construit au fil des siècles, mais également comment cette perception continue aujourd’hui de structurer le sens commun et les expériences individuelles.

Dans un monde hyperconnecté et globalisé, est-il encore possible d’opposer un « Nous » à un « Vous » de manière antagoniste ?

Quoi qu’il en soit, il est urgent de saisir les conséquences contemporaines d’un passé collectif qui a marqué les consciences individuelles et nationales. Une empreinte qui déforme les relations à soi et aux autres et dont, encore aujourd’hui, on tente de guérir.